Ces temps-ci, en plus de sortir des vieilles histoires des boules à mites pour la Saga des mauvais choix et de visionner les vieilles archives que ma mère a déterrées, je me retrouve souvent dans des endroits qui ont marqué mon enfance et mon adolescence, des salles de concert (ou de répétition) surtout. Comme si je reliais un à un tous les points qui m’ont amenée là où je suis.
En fin de semaine, j’ai assisté au concert de fin d’année du choeur de ma fille, dont la première partie consistait en quelques chants chorals, et la seconde, en un opéra pour enfants et ados (la catégorie « pour enfants et ados » étant à prendre avec un grain de sel : honnêtement, j’ai trouvé que ça avait l’air bien plus difficile que certains opéras « pour adultes »!).
J’ai trouvé cela fort émouvant, pour plusieurs raisons. La plus évidente : y a-t-il dans la vie quelque chose de plus cute que des enfants qui chantent? Je ne pense pas! Mettez-leur une chanson de Vigneault ou de Leclerc (ou plein d’autres pièces chorales emblématiques!) dans la bouche, et c’est assez imbattable!
C’est émouvant aussi parce que comme mère, j’ai aussi l’impression (assez rare) d’avoir pris une bonne décision en insistant pour que ma fille fasse partie d’une chorale. Avec ma fille, chaque saison de chorale débute par une crise monumentale où elle tente de chanter à travers son déluge de larmes (je pense que j’ai moi-même pleuré une fois!) et se termine par un spectacle où elle exulte. Généralement, sur le chemin du retour, elle s’exclame en disant par exemple : « J’adore chanter! » ou « Je veux rester dans cette chorale jusqu’à 18 ans. » À petite échelle, c’est la même chose : elle va de reculons à chacune des répétitions, et en revient en gambadant et en chantonnant. C’est facile de ressentir de la culpabilité, ou au moins de se questionner sur nos motivations, quand on « oblige » nos enfants à faire quelque chose « pour leur bien »; de se demander si l’enfant aime vraiment l’activité ou la fait seulement pour plaire, ou pour ne pas déplaire; de penser que le plaisir qu’on croit observer, on pourrait aussi le projeter tellement on voudrait y croire. Mais dans ce cas-là, je pense que je ne me trompe pas et que j’ai raison de faire confiance à mon intuition.
Et finalement, le concert avec lieu à la salle de concert de l’école Curé-Antoine-Labelle, à Laval, un endroit que j’ai fréquenté tout le long du primaire pour les concerts de Noël et de fin d’année de la concentration musique, et était dirigé (« diriger », c’est vraiment un euphémisme pour décrire ce qu’elle fait : elle joue une partition de piano injouable, tourne ses pages, donne des cues, et probablement qu’elle donne toutes sortes d’indications avec sa face qu’on ne voit pas!) par une pianiste qui m’a enseigné au Domaine Vert dans les années 1980! Peut-être même que j’ai chanté dans cette salle certaines des chansons que le chœur a chantées samedi. Quand on est enfant, on ne prend pas toute la mesure de ce qui se passe, mais revivre ces premiers concerts à travers les yeux de ma fille me fait réaliser à quel point ces moments sont déterminants et extraordinaires. Qui plus est, son « début de carrière » coïncide avec un moment où j’ai (enfin) la pleine conscience de mon plaisir de jouer de la musique (et du travail que ça exige). Transmettre l’amour de la musique à sa progéniture, c’est un peu le contraire d’un cadeau empoisonné : au début, ça va peut-être les emmerder un peu de pratiquer, mais c’est à long terme que tous les bénéfices et les plaisirs vont surgir.
En plus d’être émouvant, c’est souvent cocasse/embarrassant! Le savoir-être sur scène, ce n’est pas quelque chose d’inné… Je ne voudrais pas avoir l’air de rire de ma fille, alors je vais utiliser la fameuse technique du sandwich pour vous raconter ses exploits. Étape 1: compliments. Elle se tire très bien d’affaire malgré qu’elle soit une des plus jeunes de sa chorale. Étape 2 : « occasions d’amélioration », comme on dit dans le jargon bureaucratique, ou « défis », celui de l’éducation. Dans ses derniers concerts, je l’ai vue : se gratter l’entrejambe avec les mains à l’intérieur de sa jupe; être joyeusement dépeignée alors que je m’étais tant efforcée de lui faire de belles tresses; bâiller; se ronger les ongles pendant un temps mort de l’opéra; donner des coups de coude à ses voisines quand elles se trompent ou quand elle trouve qu’elles prennent trop de place; avoir des moments d’absence totale, etc. Étape 3 : plus de compliments. C’est un effort immense qui est demandé à ces très jeunes filles : elles chantent de mémoire tout le long du concert, et doivent en plus retenir des chorégraphies assez complexes. C’est beaucoup à apprendre en si peu de temps, on peut bien leur pardonner quelques égarements!
Pour une fois, je vais essayer de garder ça « semi-court » en ne vous racontant pas une anecdote pour chaque lieu de ma « constellation musicale » ou chaque oeuvre que j’ai revisitée récemment. Comme une image vaut 1000 mots, et qu’un vidéo comporte généralement 24 images/seconde, ça va être nettement moins long de montrer un autre des vidéos ressurgis du passé grâce aux bons soins de ma mère. Une remarque tout de même : dans mes souvenirs, j’étais généralement très sûre de moi à l’orchestre et à la chorale, et j’y mettais du coeur, malgré une tendance vers un jeu parfois robotique. Mais la veille de ce concert, on m’avait posé des broches, et c’était tout un défi de bouger ma lèvre supérieure à cause de leur configuration. Ça explique sans doute pourquoi j’ai l’air complètement apathique à mon dernier concert de Pierre-Laporte. Je pense que mes broches toutes neuves m’empêchaient peut-être de respirer aussi…
Pour finir, vu qu’on parle de la salle Claude-Champagne, je vous rappelle que l’Ensemble Sinfonia, dont je fais partie, y donnera un concert le samedi 15 juin à 19 h 30. Un concert qui promet, avec Louise Bessette, une pianiste de premier plan! Détails ici.
À très bientôt!
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